Ahriman : L'Exilé by John French

Auteur:John French
La langue: fr
Format: mobi, epub
Éditeur: Black Library
Publié: 2014-05-15T00:00:00+00:00

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L’INVOCATION

Kadin n’avait jamais connu une obscurité pareille. Ce n’était pas comme s’il était aveugle, il avait toujours l’usage de sa vue, mais les ténèbres étaient telles qu’elles semblaient exercer une pression sur ses yeux. Le noir planait comme une lourde chape. Des objets apparaissaient sur l’affichage de son casque, parfois au dernier moment, si bien qu’il se demandait comment il avait pu ne pas les voir plus tôt. Il regardait devant lui sans rien voir, faisait un pas et distinguait un ensemble de machines au-dessus de sa tête ou une masse de câbles lui barrant la route. Plusieurs fois, il s’était retourné vers les objets qu’il venait de dépasser, pour ne voir que l’obscurité et un crachin de parasites verts.

Il y a bien longtemps, sur un monde dont ses frères et lui étaient les seuls à se rappeler, il était né dans le noir. Comme tous les autres. Dans des cavernes qui n’avaient jamais connu la lumière du soleil ou des étoiles, il avait appris à lire les courants d’air, à sentir avec son odorat, son toucher et son ouïe. Quand ils étaient venus le chercher pour l’élever à la lumière, il s’était souvenu du noir. Le noir qui était son père et sa mère. Ainsi les chapelains s’étaient chargés de son éducation, et il avait appris les mystères cachés derrière ces mots. Lui et l’obscurité ne faisaient qu’un. Mais pas ici. Dans les coursives de cette station morte qu’il observait par sa vision nocturne, il se rappela du noir qui remontait parfois des entrailles de son monde natal. Il se souvint des cavernes reculées où il ne ressentait et n’entendait que les battements de son cœur. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas repensé à tout cela.

— Rien, » dit-il dans le vox avant d’entendre l’écho crépitant de sa propre voix dans son oreille.

— Compris, » répondit Thidias d’une voix toujours aussi rigide malgré les transmissions brouillées du vox. « Aucun signe de menace par ici. »

Ils patrouillaient dans les couloirs depuis près d’une heure, suivant ainsi les instructions d’Astræos, qui leur avait demandé de surveiller le chemin menant à la navette. Ils évoluaient seuls, reliés par le vox et les icônes de localisation pulsant sur leur affichage rétinien. Depuis qu’ils avaient commencé, Kadin n’avait rien vu, rien entendu, rien senti, mais tout cela ne lui disait rien qui vaille. Dans son casque, il n’y avait d’autre bruit que son souffle et le vrombissement sourd de son armure. Ces sons auraient dû le rassurer. Il les côtoyait depuis si longtemps qu’il avait l’impression d’être privé d’un membre lorsqu’il quittait son armure. Mais dans ces coursives plongées dans le noir, les bruits familiers lui semblaient étrangers, comme s’ils étaient ceux de quelqu’un d’autre.

— Cela ne sert à rien, » dit-il en entrant dans un large couloir aux cloisons hérissées de rivets. Il y avait des traces de tirs sur le mur et des douilles de bolt au sol, mais elles étaient aussi froides et mortes que le reste de la station. « Il n’y a aucun signe de menace parce qu’il n’y a absolument rien ici.

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